Il est essentiel d’aborder maintenant le bilan des multiples applications de la Photobiomodulation en le concentrant sur les dix dernières années. Mis en oeuvre grâce aux conquêtes technologiques des LED et des Lasers de basse puissance, il marque le début d’une histoire thérapeutique fondée sur l’agent physique fondateur de la dualité onde corpuscule, le Photon.
De très nombreuses études biologiques, biophysiques et surtout cliniques, ont ainsi ouvert la porte à de nouveaux gestes thérapeutiques, autonomes et/ou complémentaires.
Ces gestes, au départ surdéterminés par la rareté des appareils LASER ou LED sont aujourd’hui de plus en plus souvent optimisés en termes de fréquence, de durée d’exposition, de puissance et de longueur d’onde.
La précision de la longueur d’onde, d’ailleurs, n’a aucune raison, dans la pratique, d’être envisagée. Nous parlerons souvent de domaines de longueurs d’onde et la principale raison tient à la difficulté extrême de produire des sources de lumière strictement monochromatiques.
C’est possible dans un laboratoire de physique optique, mais impossible pour un dispositif de taille raisonnable destiné à un cabinet médical. De surcroît, ce sont les cibles qui font le choix des longueurs d’onde qui interagissent avec elle. C’est bien ce qui se passe sous la lumière du soleil. D’une certaine façon on pourrait dire d’une journée à la plage qu’elle est une séance de Photobiomodulation… à très large spectre.
L’essentiel est ainsi de définir des espaces de longueurs d’onde à l’intérieur desquels se trouvent les fréquences qui ont démontré leur capacité à exciter les composants biologiques du vivant.
On a coutume de désigner ces espaces comme des « domaines de longueurs d’onde » aptes à déclencher un phénomène de Photobiomodulation.
Cela nous permet de découvrir les domaines de longueurs d’onde émis par une diode laser dont le pic d’émission est à 808 nm et par une diode de type LED dont le pic d’émission est à 660 nm, qui équipent couramment les dispositifs médicaux.
On constate que la diode laser émet entre 806 nm et 809 nm alors que la LED commence à émettre des photons vers 600 nm et s’arrête vers 720 nm…
Ce qui va cependant compter c’est le pic de la courbe, là où la densité de photons est de très loin la plus importante. Nous trouvons ainsi plus ou moins 1 nm pour le laser et plus ou moins 5 nm pour la LED.
Ajoutons à notre réflexion que nos cibles absorbent la lumière sur une très large étendue de fréquences, donc de longueurs d’onde.
La spécificité absolue des longueurs d’onde n’est donc pas discriminante et mieux vaut travailler sur un « domaine de longueurs d’onde » un peu étendu. D’où l’intérêt des LED, dont les pics de puissance peuvent être équivalents à ceux produits par des lasers.
Ces derniers possèdent cependant une caractéristique particulière, celle d’émettre un faisceau de lumière partiellement polarisée.
Certains auteurs ont émis l’hypothèse d’un gain d’efficacité thérapeutique, par rapport aux LED, lié à cette polarisation, mais à ce jour rien ne le démontre vraiment.
En résumé, du début du bleu jusqu’à la fin du proche infrarouge, cinq domaines plus ou moins larges de longueurs d’onde, autour de cinq longueurs d’onde centrales (415 nm, 470 nm, 635 nm, 660 nm et 850 nm), concernent la stimulation ou la réparation tissulaire, la limitation de l’inflammation, la sédation de la douleur et la lutte contre l’infection ou l’infestation.
Ils sont simples à mettre en oeuvre, avec succès, dans de très nombreux domaines. Si l’on revient aux mécanismes gourmands en énergie, propres par exemple à la cicatrisation, on comprend que la réponse énergétique physiologique apportée par la lumière dans le visible et l’infrarouge puisse être précieuse.
Les résultats sont ainsi obtenus en utilisant des dispositifs médicaux (panneaux ou pièces à main) équipés de LED et/ou de lasers de basse puissance, émettant dans le bleu, le rouge et le proche infrarouge.
Ces dispositifs disposent de programmes adaptés à telle ou telle indication et permettant tout particulièrement d’émettre la lumière en mode continu ou en mode pulsé à des fréquences lentes, autour de 1 Hz, rapides à 5O Hz ou très rapides, de 1000 Hz à 10000 Hz, ce qui peut être précieux dans le traitement de la douleur.
Ces fréquences vont en tout cas permettre d’étaler dans le temps la « dose » de lumière administrée sans accumuler d’échauffement. Les systèmes proposés utilisent pratiquement tous un cycle « utile », Duty Cycle en anglais, de 50%…. Cela qui signifie que le faisceau lumineux ne sera émis que durant la moitié du temps de fonctionnement.
Deux autres modes viendront si besoin ajouter à cette régulation thermique. Le premier concerne les fréquences d’émission lentes, autour de 10 Hz.
Il permettrait d’obtenir des effets de pompage afin de stimuler les flux ioniques à travers les parois, à l’intérieur de la cellule ou entre la cellule et le milieu extra-cellulaire.
Par ailleurs, des fréquences élevées, autour de 10 KHz contribueraient à moduler la conduction nerveuse et à obtenir un effet antalgique
Comme nous l’avons déjà souligné, entre LED et Lasers, les effets obtenus sont très comparables.
Cependant, de rares dispositifs, associent aux LED des lasers rouges ou infrarouge « nanopulsés », dont nous avons déjà évoqué la technologie. La lumière y est émise sous la forme d’impulsions beaucoup plus puissantes mais extrêmement brèves, autour de 100 à 200 ns (nanoseconde), soit 100 à 200 milliardièmes de seconde. Ces impulsions, bien trop brèves pour chauffer, représentent une densité de photons très élevée qui ont le potentiel d’agir plus profondément.
Il faut enfin tenir compte des effets anti-infectieux très larges de la lumière bleue (de 415 à 470 nm). Ils concernent aussi bien les bactéries que les levures et les parasites. À cet égard, le revêtement cutané, singulièrement au niveau du visage, est un habitat pour Proprionibacterium acnes et pour le Demodex, parasite très fréquemment présent dans la rosacée du visage et/ou des paupières. Ce parasite possède un fort tropisme pour les glandes sébacées et pour leur équivalent, les glandes de Meibomius, qui tapissent la face postérieure, muqueuse, des paupières. Elles y sécrètent un équivalent du sébum, le meibium, qui se mêle aux larmes en y apportant ses composants lipidiques et joue ainsi un rôle capital dans la diminution de l’évaporation et la protection de la cornée.
L’importante sensibilité de ce parasite à la lumière nous a, par exemple, permis de mettre récemment en évidence les ressources thérapeutiques de la Photobiomodulation dans le syndrome de sécheresse oculaire. Pour en savoir plus sur ce sujet, vous pouvez consulter le site du Dr Sorinela Roata qui a ouvert à Paris une consultation de traitement de la sécheresse oculaire par photobiomodulation.
En dehors de cette muqueuse palpébrale, deux autres muqueuses, buccale et génitale, sont le siège fréquent d’infections bactériennes, virales ou parasitaires : elles peuvent bénéficier des propriétés de la lumière, dans les domaines de longueurs d’onde du bleu autour de 415 nm ou de 470 nm.
Considérons enfin les conditions pratiques d’utilisation des dispositifs thérapeutiques de Photobomodulation. Que la surface traitée soit cutanée ou muqueuse, il conviendra de traiter au plus près la zone choisie. En effet, un faisceau lumineux, provenant de n’importe quelle source, sauf d’un laser collimaté, à la forme d’un cône circonscrit le plus souvent dans un angle de 50 à 60°. Dans ce cas, qui est le plus fréquent, la surface éclairée par la zone sera inversement proportionnelle au carré de la distance. Si par exemple à 1 cm la densité de puissance lumineuse est de 20mW/cm2, à 2 cm elle ne sera pas de 10 mW mais de 5 mW/ cm2… et à 10 cm elle ne sera plus que de 0,2mW/cm2.
Beaucoup de documents publicitaires professionnels continuent à montrer des visages ou des parties du corps traitées à 10 cm alors que les puissances délivrées annoncées ont été calculées à 1 ou 2 cm de distance.
De surcroît, la proximité de la source lumineuse avec la peau diminuera la part de lumière réfléchie par celle-ci. Cela est très important si la peau est très claire. D’un autre côté, une peau noire posera un autre problème. Gardons en effet en tête les courbes d’absorption de la lumière par les principaux chromophores, dont nous avons parlé précédemment. Rappelons-nous que dans le visible, l’eau n’absorbe plus la lumière mais ce n’est pas le cas de la mélanine, accumulée par les kératinocytes au niveau de l’épiderme. Une peau noire aura ainsi tendance à s’échauffer beaucoup plus rapidement qu’une peau blanche. Les différences ethniques joueront ainsi, dans de nombreux cas, un rôle très important.
L’hémoglobine, en revanche, présente sous ses deux formes dans le sang circulant en abondance dans les boucles capillaires du derme réticulaire, constituera une zone d’absorption identique quelle que soit le profil ethnique.
Pour être complet, il faut tout de suite préciser que la zone cutanée superficielle, épidermo-dermique, est la cible par excellence pour la Photobiomodulation, notamment pour traiter certains problèmes de pigmentation ou de rougeurs, et pour celui, très important, de la cicatrisation.
De leur côté, trois muqueuses vont être faciles d’accès pour la Photobiomodulation. Ce sont les muqueuses buccales et vaginales. Très comparables dans leur structure anatomique, elles sont exposées à différents problèmes trophiques, lésionnels, infectieux, vis à vis desquels la Photobiomodulation joue un rôle réparateur, curatif, antalgique très important.
Nous avons ainsi évoqué, dans le chapitre précédent, l’efficacité antalgique et cicatrisante de la lumière dans les mucites post-chimio ou radiothérapie. Il convient d’observer que ces mucites peuvent être traitées directement à l’intérieur de la bouche ou, beaucoup plus simplement en transjugal, donc à travers les joues, si elles sont localisées sur leur face interne.
Cette capacité que possède la lumière, dans le rouge et le très-proche infrarouge, à pénétrer profondément les tissus superficiels ou semisuperficiels, permet ainsi de traiter facilement les lésions cutanées et muqueuses.
C’est ainsi que, par exemple, sur le principe du traitement transjugal, des dispositifs ont été mis au point pour traiter la prostate par voie transrectale.
Cette pénétration très importante est réservée au Rouge et au très proche Infrarouge, l’absorption par l’eau étant nulle ou minime.
Le plus étonnant, peut-être, aura été la récente « première commercialisation » d’un dispositif destiné à être introduit dans une fosse nasale, afin d’éclairer les noyaux de la base du crâne impliqués dans le développement de la Maladie de Parkinson. La lumière, toujours dans le rouge et le proche infrarouge pénètre facilement le plancher de la base du crâne au niveau de la lame criblée de l’ethmoïde.
Il faut également souligner la réussite expérimentale en clinique humaine et la commercialisation de dispositifs transcrâniens émettant dans l’infrarouge. Ils sont destinés à atteindre le cortex frontal ou pariétal, pour traiter la Maladie d’Alzheimer aussi bien que les états dépressifs, les séquelles de traumas crâniens ou plus simplement les pertes de mémoire.
Ce tour d’horizon des circonstances et règles d’utilisation de la Photobiomodulation ne saurait se terminer sans rappeler un dernier facteur très important :
Il s’agit de la puissance délivrée par les appareils, c’est à dire les dispositifs médicaux, mis à la disposition des praticiens.
Comme je l’ai souvent précisé, il convient de parler de densité de puissance exprimée en watts/cm2. 1 Watt étant la puissance capable de délivrer une énergie de 1 Joule par seconde, et sachant que la plupart des traitements sont conçus pour délivrer autour de 10 à 20 Joules dans le tissu traité en une dizaine de minutes, les sources de lumière utilisées ont une densité de puissance qui s’exprime en milliwatts par cm2…. (mW/cm2)
C’est ainsi que beaucoup de dispositifs affichent des densités de puissance délivrées de l’ordre de 20 à 50 mW/cm2. Un petit pointeur laser rouge tel que ceux utilisés lors d’une conférence délivre une densité de puissance de moins de 5 mW/cm2….
Si l’on fait un survol des publications produites depuis une quinzaine d’années, on constate ceci :
La quasi-totalité des expérimentations ont été faites à l’aide de dispositifs LED et/ou Lasers de puissance faible ou moyenne (5 à 50 mW/cm2). Les durées de traitement ont été ainsi globalement établies entre 10 et 15 minutes, voire plus.
La raison principale en était les limites technologiques des fabricants de LED, mais également les craintes non justifiées d’utiliser des sources beaucoup plus puissantes. Il est temps aujourd’hui d’étudier les effets de ce type de sources (150 mW à 1 W/cm2) avec des durées de traitement beaucoup plus courtes, par exemple de 30 secondes à 2 minutes. Nous disposons aujourd’hui de LED et Lasers beaucoup plus puissants, incluant les modes nano-pulsés déjà évoqués. Grâce à de nombreuses évaluations, nous savons que c’est une hypothèse sans risque.
Cependant, un véritable déferlement d’appareils destinés au public, et utilisant la Photobiomodulation, est annoncé. On assiste déjà, dans les pays anglo-saxons, à la commercialisation de panneaux de tailles diverses à des prix étonnamment bas. Ils sont équipés de LED de générations précédentes qui n’ont rien à voir avec celles équipant les dispositifs professionnels, destinés au traitement de pathologies sérieuses voire invalidantes.